Un changement éventuel de statut qui n’impliquerait que les parlementaires serait à l’image de la vie politique réunionnaise. Une partition jouée par les élites et les associations qu’elles contrôlent. C’est uniquement dans cette sphère d’influence où l’argent est roi, que les enjeux qui concernent notre pays, sont débattus sans aucune transparence.
L’aliénation politique est double. Elle consiste non seulement à écarter le peuple des affaires de la cité, mais elle entoure également la classe politique et le milieu associatif d’un doux halo d’ignorance. Cet entre-soi manipulé par la franc-maçonnerie, la crypto-maçonnerie (le grands financeurs des bonnes œuvres en outremer que sont les lions’s club ou Rotary) et les gros partis nationaux pense pouvoir assurer le monopole de la pensée éternellement. Il poursuit ainsi la mission visant à faire accepter le colonialisme ou aujourd’hui l’assimilation pour un projet humaniste. Mission insufflée à la franc-maçonnerie africaine dont un des précurseurs Blaise Diagne avait d’ailleurs été initié à La Réunion ou il exerçait comme administrateur colonial.
Pour cela, l’entre-soi infiltre, manipule, use de calomnie et parfois utilise la violence sans que la presse qu’il contrôle n’en relate publiquement les connivences ou les bavures.
Dans la même lignée, le débat sur le changement statutaire semble vouloir se faire sans les forces politiques qui le réclament depuis des décennies. Nous remarquons donc qu’en parallèle à une opération de buzz médiatique qui verra certains élus se faire promouvoir par la macronie, la presse coloniale et l’intelligentsia reunionnaise usent de la rhétorique habituelle pour tenter de faire passer le changement statutaire pour un simple changement de mode d’emploi ou prérogatives en ce qui concerne l’appareil politique local. Autrement dit faire passer un changement statutaire pour un « coup d’état » non planifié, ce qui à nécessairement comme impact de terroriser le peuple et de l’éloigner des réflexions que nous autres » méchants monstres » infréquentables tentons de mener en réclamant la souveraineté.
Pourtant ce changement non planifié, évoqué par la presse, mais surtout manigancé par l’état colonial en décadence, n’est absolument pas la position des souverainistes réunionnais.
A la Réunion, le combat pour la souveraineté n’a jamais été dépolitisé ou scandé sous forme de slogan pour jeter l’opprobre sur les uns où servir de tremplin pour les autres qui défendraient surtout les intérêts français dans ses colonies d’Outremer ( voir pour cela notre article sur l’autonomie version « macron »: https://www.facebook.com/106346711085891/posts/495103298876895/).
Le combat pour la souveraineté s’inscrit dans une longue histoire de lutte à La Réunion et il a toujours été pensé avec une idéologie.
– Les marrons ont commencé dès 1663 à rompre avec la société esclavagiste et à constituer un modèle politique indépendant dans les montagnes de La Réunion. Ils avaient non seulement un système politique avec un roi des capitaines et une hiérarchie mais ils ont également forgé l’âme révolutionnaire réunionnaise amoureuse de liberté et d’égalité.
– Eli esclave forgeron de la ravine du Cap à St Leu constituera lui aussi une révolte pour abolir l’esclavage et rompre avec le système colonial en cours en 1811. Cette révolte qui avait son propre drapeau pris forme autour du bassin Misouk ou nos ancêtres avaient l’habitude de se concerter.
– En 1836 Louis-Timagène Houat, descendant du Golfe de Guinée par son père mis en esclavage, est exilé à Paris après avoir fomenté une révolte anti-esclavagiste à St André. On accuse même Houat à l’époque d’avoir brandi le drapeau d’une république africaine !
Il y a donc des exemples connus dans notre histoire qui affirment l’existence d’une volonté réunionnaise très ancienne pour construire un autre État indépendant et en rupture avec l’ordre colonial établi…
– En décembre 1963 encore, le PCR, la CGTR et l’union des femmes de La Réunion signaient la déclaration du manifeste de la table ronde qui réclamait l’autonomie et surtout la décolonisation de La Réunion. Nous pouvons nous arrêter sur ce point, puisque nous considérons que la gabegie financière, le trucage électoral et l’entre-soi héréditaire sont bien des pratiques héritées de l’ère colonialiste et de sa période départementaliste qui perdure jusqu’à aujourd’hui. Rappelons qu’un Michel Debré érigé en sauveur pour les uns, fut maintes fois élus par le bourrage des urnes. La position décoloniale que nous revendiquons s’intéresse notamment à notre rapport au pouvoir et au fait politique conçu dans un continuum colonial. Décoloniser La Réunion et donc les mentalités, devrait être intrinsèque à toutes les luttes pour un changement statutaire de notre île.
– En 1971, la convention du Morne Rouge exigeait la fin de la départementalisation et l’autonomie statutaire. Non pas dans une volonté de statu quo dans le giron national mais avec vocation d’indépendance (encore faudrait-il en débattre et souligner peut-être les nuances entre la vision de Aimé Césaire et celle de Paul Vergès plus assimilationniste à cette époque). Rien à voir encore avec les serviteurs de la Macronie qui iront défendre un statu quo colonial pour moins de transferts financiers de la part de l’État… autrement dit le futur chaos avec l’impossibilité pour notre peuple de se décoloniser réellement.
– En 1985, à la conférence des dernières colonies en Guadeloupe, le MIR (mouvement indépendantiste réunionnais fondé en 1981) sera beaucoup plus incisif sur sa vision souverainiste pour La Réunion en fustigeant l’impérialisme et le sous-développement. Cette vision est celle qui selon nous décrit le plus fidèlement la situation de notre pays encore sous contrôle des monopoles et de la monoculture de la canne.
Malgré le peu d’avancées concédées par l’État colonial depuis 30 ans, nous nous apercevons que le débat statutaire est tellement d’actualité, que même les grands coups médiatiques de criminalisation des mouvements souverainistes réunionnais ne parviennent pas à éteindre la flamme nationaliste anticoloniale réunionnaise. Un fait terriblement d’actualité qu’il faut questionner non pas sur la menace de la perte du minimum vital, mais sur l’espoir d’une nouvelle société basée sur une nouvelle justice sociale, apaisée et laissant vivre pleinement nos particularités nationales en paix avec leurs enfants, qui entendent bien les faire vivre et les transmettre aux générations futures.
Alors que la traditionnelle liturgie assimilationniste s’emploie à faire peur aux Réunionnais, plutôt que de poser la question sur un ton benêt et de demander au passant lambda s’il aurait une vague idée de ce que l’on appelle autonomie…Nous affirmons encore que nous ne sommes pas dans un combat pour changer l’appareillage politique sous la tutelle de la France ou de l’OTAN et de leurs colons endogènes. Nous ne posons d’ailleurs aucune question mais renouvelons encore et à bon entendeur, notre appel :
– pour l’édification d’une conscience nationale réunionnaise décolonisée d’abord !
– pour l’appropriation de notre potentiel de développement (ressources et forces de production)
– pour la mise en place des groupes indépendantistes. Dans tous les corps de métier, il est urgent de mener une réflexion sur notre souveraineté à construire face aux grands changements de demain.
C’est en corollaire à tout cela que se pose notre exigence d’indépendance et non dans un suivisme de l’agenda françafricain qui tentera toujours de s’accrocher à notre territoire jusqu’au largage inéluctable.
Pour une Réunion libre ! In sél pép, in sél nasyon, anou mém Renyoné.
Ka-Ubuntu
Photo : ZINFOS 974